Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Coeur de miel
Coeur de miel
  • Ici, on parle de mangas, de cinéma, de stars de Bollywood de dollz et de la série "Veronica Mars" !! Quelques photos et des coups de coeur émailleront le tout. Mon ambition : que tout ça serve à quelque chose !
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Archives
21 mars 2005

le cauchemar de Darwin

Voilà, pour mon 100ème message (ouaih !!), je voulais revenir sur quelque chose de plus sérieux que les dollz : un film. Oui, mais pas n'importe lequel. Celui de Hubert SAUPER qui a pour titre "Le cauchemar de Darwin" -ou "Darwin's nightmare" en VO.

la_cauchemar_de_darwinIl se passe en Tanzanie, aux abords du lac Victoria, duquel sont tirés chaque semaine des tonnes de poisons, la Perche du Nil. En plus de causer des ravages écologiques en détruisant les espèces alentour, elle détruit toute l’économie de la région. Et, tandis que le beau poisson s’envole dans d’énormes cargos russes vers l’Europe, la population se contente des restes et vit en situation de famine.

On peut dire qu'il s'agit d'un documentaire car il filme des faits réels. Pour autant, il y a un véritable récit en filigrane. Ces gens ne sont pas filmés au hasard, Sauper va nous amener, au fil des images et des commentaires à comprendre ce qui se passe tout autour de ce lac. La Perche du Nil n'est qu'un point de départ qui va nous emmener bien au-delà, à rfélchir à ses conséquences et ce qu'il y  derrière ce commerce lucratif : le armes. D'où l'affiche du film. Le poisson, passant à l'état de carcasse, se métamorphose en arme. Plus on avance plus on comprend que le poisson, goûteux est pour les européens, les cracasses pour les populations locales et les armes pour foutre le bordel dans tout ça. C'est la mutation dont parle le titre. Que dit Darwin : les mieux adaptés survivent, en gros. Je pense que dans le film, cela fait référence a la Perche du Nil qui, introduite, selon la légende, dans les années 60 par un colon anglais qui s'ennuyait et qui, pour se distraire a décidé de faire de la pêche sportive (!), a finie par coloniser avec ses 1,50 mètres d'envergure, une grande partie du lac Victoria, tuant des centaines d'espèces vivant pourtant là deopuis des millénaires. Cela fait penser à un reportage, vu dans Thalassa dernièrement, qui parlait des King Crab. Ces crabes transférés de Vladivostok à la mer de Barentz par le scientifique russe Youri Orlov pendant l'ère soviétique. Ils ont maintenant mutés et font près d'1m20 d'envergure (ça rapelle quelque chose ça...) et ils colonisent la mer (ça aussi tiens !) au point que les filets de pêcheurs se prennent très souvent dedans. Mais ils sont (eux aussi, mince alors !) un met très goûteux, qui font le bonheur des ... européens (vous aurez deviné). C'est là tout le paradoxe du poisson, comme du crabe : ce sont des mines d'or commerciales, pour ceux qui les exploitent, mais un désastre écologique et humain pour les populations locales. Autour du lac, quelques usines traitent le poisson mais, combien de personnes sont employées par rapport à celles qui meurent de ce commerce ?

blopblopIl attire cependant de nombreuses personnes, de la campagne vers les abords du lac. Une explication, par l'un des protagonistes (il n'y a pas de voix-off) est frappante : les femmes de la campagne voient leurs maris mourir, souvent du sida, donc elles viennent en ville, se prostituent pour gagner un peu d'argent et survivre, mais, du même coup, elle contaminent les pêcheurs qui meurent... De nombreuses victimes sont ainsi entraînées vers la mort, à la chaîne. Quand au pasteur du coin, inciter les pêcheurs à mettre des préservatifs, seul moyen préventif efficace, reviendrait à aller contre les principes de l'église... On tourne en rond.

Que font les autres ? Ils sont employés comme pécheurs, et ne croyez pas qu'ils ont des embarcations sophistiquées. Certains restent dans l'eau et plongent dans l'eau afin de rabattre le poisson. Technique dangereuse et aléatoire. Ceux qui sont malades ? Il vaut mieux qu'ils se déplacent tout de suite près du cimetière, ça coûtera trop cher de les déplacer...

Comme je l'ai dit précédemment, il n'y a pas de voix-off du réalisateur mais des témoignages. Des enfants des rues qui sniffent les emballages vides après les avoir fait brûler puis dorment inconscient dans les rues au risque de se faire dépouiller (oui, mais quoi ?), des femmes en état de léthargie car en phase terminale du sida, incpapble de s’occuper de leurs enfants, un artiste qui dépeint la vie dans la rue : les bagarres, la nuit à même le sol dans la rue, les jeunes filles s’accompagnent de garçons plus jeunes pour éviter de se faire violer...,

ad_citam_copyright

© Ad Vitam

Quelques personnes reviennent et le réalisateur Hubert SAUPER les apprivoise petit à petit, les incitant ainsi à dévoiler leur vie au quotidien. Notamment un gardien de nuit d’un centre de recherche, ancien et futur soldat, pour qui la guerre est une période de vie beaucoup plus facile que celle de tous les jours. Son regard est impressionant, et tout ce qu’il dit, même les choses qui nous paraissent choquantes, il le dit avec le sourire, un sourire énigmatique, qui me reste en mémoire. L’histoire de l’une des girlfriend des pilotes russes, venus cherche le poisson, est aussi saisissante. Alors qu’elle tente, dans un moment en suspens, en quelque sorte de s’échapper de son univers (c’est mon interprétation) en chantant une chanson intitulée Tanzania, sur son pays, le pilote ne fait que la couper continuellement en tentant de reprendre le refrain, sans aucun égard pour le reste de la chanson. On apprendra plus tard les espoirs qu’elle fonde, pour apprendre quelques temps plus tard sa mort, battue par l’un de ses « petit-ami » pilote... Désolant.

Pendant que les poissons sont transformés en filet et emballés dans des caisses frigorifiques, les tanzaniens mangent les restes. C'est à dire ? Pas grand chose : la tête, les entrailles. Vous allez me dire : rien de mangeable la dedans ? Eh bien si, il y a un commerce pour cela, des gens s'échinent autour de ces carcasses, et grillent les têtes à l'huile afin qu'elle soient vendues... tout ça parce qu'ils n'ont pas les moyens de manger de la Perche du Nil, trop chère. En attendant, la famine est annoncée à la télévision et les ONG arrivent. Tandis que les autorités européennes se félicitent de la mise en conformité des usines du lacs aux standards européens. Ecoeurant !

Vers la fin, un journaliste tanzanien est interviewé, et c’est véritablement à ce moment qu’on parle clairement des armes. Selon lui, le commerce du poisson n’est rien par rapport à celui des armes. Le petit aéroport serait en fait une plaque tournante d’un commerce illégal d’arme à destination des pays en guerre voisins. SAUPER nous avait préparé à ça au début, puisqu’il demandait aux pilotes s’ils venaient à vide chercher la Perche du Nil. Au début, la réponse était évidemment non, mais au fil de la relation de confiance que tisse SAUPER, les pilotes arrivent à avouer leur triste cargaison, ils le déplorent d’ailleurs. L’un dit avoir déjà convoyé des tanks, l’autre ne se pose pas la question : il pilote son avion, c’est tout.

Voilà ! Le poisson est transformé en arme, véritable commerce lucratif depuis l’Europe. Tout ça sous le regard du poisson mécanique, sommaire et dérisoire déco du bureau du patron d’une usine, nous chantant « Don’t worry, be happy »... comble de l’ironie !

Bref, vous aurez compris que ce film m’a beaucoup marquée. Ce que je souhaite c’est que ce film, multi-primé à plusieurs festivals soit vu par un maximum de personnes, pour qu’on arrête d’oublier l’Afrique et de ne s’en souvenir que pour l’exploiter à sens unique. Car la Tanzanie n’est pas la seule touchée, Hubert SAUPER rappelle qu’il aurait aussi bien pu « faire la même démonstration en Sierra Leone, les poissons seraient des diamants, au Honduras ils seraient des bananes, et en Irak, au Nigeria ou en Angola… ils seraient du pétrole brut. »(dixit. la revue de presse du film).

hubert

Hubert SAUPER.

A noter que la réalisation laisse la part belle aux protagonistes et les suit dans leur vie quotidienne. De ce fait, certains endroits, comme la décharge à poisson, sont difficiles à supporter. La caméra n’est pas fixe, ce qui peut donner mal au cœur à force. Mais n’est-ce pas minime par rapport à tout ce qu’ils endurent ?

Pour d’autres infos, je vous conseille la société de distribution du film, AdVitam, le site d'Hubert SAUPER, le dossier de presse et le site du film

.

Dans le dossier de presse le réalisateur nous raconte la génèse de son film : alors en train de tourner « Kisangani Diary », il remarque que « Tandis qu’un premier avion-cargo atterrissait avec 45 tonnes de poids chiches d’Amérique pour alimenter les réfugiés dans les camps voisins de l’ONU, un second décollait pour l’Union Européenne avec 50 tonnes de poissons frais à son bord. » ? C’est ainsi que débute, selon ses termes son « plus long engagement cinématographique. » pour découvrir ce que l’on a fait du « berceau de l’humanité ». Car c’est aussi, et surtout, une critique du capitalisme qui est peinte ici.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité